Partie 2 : Les premières arbitres féminines de l’élite

Au début des années 90, le football féminin continue de se développer, à l’image de l’organisation de la première Coupe du Monde de football féminine en Chine en 1991. Dans le même temps, une politique de féminisation de la corporation arbitrale est menée par la Commission Centrale des Arbitres présidée par Michel Vautrot, suivant les recommandations de la FIFA. Dès 1995, la Commission des Arbitres de la FIFA décide de créer une liste de centrales et d’assistantes internationales. La française Florence Guyot, première femme à être devenue arbitre de la Fédération en 1994 et officiant en Championnat de France Amateur sur des rencontres masculines, fait partie des vingt-cinq arbitres internationales nouvellement nommées en tant que centrales. Mais à cette période, la CCA ne dispose pas d’arbitres assistantes au sein de la Fédération. Michel Vautrot, qui doit faire remonter une liste auprès de la FIFA, décide alors de sélectionner les deux arbitres féminines qui évoluent en Division d’Honneur (le plus haut niveau Ligue) pour les intégrer dans ce groupe tout juste mis en place. Nelly Viennot et Corinne Lagrange intègrent ainsi le groupe des arbitres assistantes internationales, sans même avoir passé l’examen de la Fédération.

Dès lors, la FIFA compte utiliser davantage de femmes pour diriger les rencontres internationales féminines. Corinne Lagrange est dans ce cadre sélectionnée, en 1995, pour officier lors de la Coupe du Monde féminine organisée en Suède. L’année suivante, Nelly Viennot est sélectionnée pour les Jeux Olympiques d’Atlanta. Dans le cadre de sa préparation pour cette compétition, la CCA la désigne à la touche sur une rencontre de D1, opposant le PSG et Martigues le 23 avril 1996, qui lui permet de devenir la première femme à officier lors d’un match de Première Division masculine. Elle entre aussi, quelques mois plus tard, dans l’histoire de la FIFA avec la Mexicaine, Maria Rodriguez-Roman, et la Danoise, Gitte Holm, en devenant l’une des premières femmes à officier dans un tournoi international masculin lors des JO d’Atlanta.

À partir de la Coupe du Monde féminine en 1999, organisée aux États-Unis, seules des arbitres féminines sont sélectionnées ce qui constitue une première pour une compétition féminine internationale. L’arbitre française Ghislaine Péron-Labbé, tout juste nommée arbitre assistante internationale, est sélectionnée pour officier lors de cette épreuve. En septembre 2001, la Commission des Arbitres de l’UEFA organise son premier séminaire européen pour les arbitres féminines, pour lequel elle convie quarante-six femmes à Nyon (Suisse). Dans un contexte de féminisation du football, mais aussi de l’arbitrage au plan international, la Direction Technique Nationale nouvellement créée franchit un nouveau cap en 2002, en créant le titre d’arbitre « fédérale féminine ». Ce nouveau statut permet dès lors aux femmes qui réussissent l’examen de diriger des rencontres de D1 féminine, qui étaient jusque-là arbitrées majoritairement par des arbitres masculins « Fédéral 5 ».

Finalement, au début des années 2000, trois arbitres-assistantes (Nelly Viennot, Corinne Lagrange et Ghislaine Perron-Labbé) officient sur les rencontres de Ligue 1, donnant ainsi une certaine visibilité à l’arbitrage féminin. Nelly Viennot est même associée à l’arbitre international Éric Poulat et officie lors de nombreuses rencontres prestigieuses de Ligue des Champions. Le 24 octobre 2008, Sabine Bonnin devient la première féminine à diriger un match professionnel, à l’occasion d’un Angers-Tours, en Ligue 2. Elle remplace le central blessé. Le mouvement est ainsi en marche…  Stéphanie Frappart viendra encore plus amplifier la mise en avant de l’arbitrage féminin quelques années plus tard…

Alexandre Joly est un historien du sport. Il a soutenu une thèse en 2021 portant sur l’histoire des arbitres dans le football professionnel français durant le XXe siècle.

Florence Guyot, Corinne Lagrange et Nelly Viennot