Les années 1960 et 1970 constituent les « Vingt Glorieuses des femmes », avec des avancées sociales fortes, comme la légalisation de la contraception, permise par la loi Neuwirth en 1967, et le droit à l’avortement consacré par la loi Veil en 1974. L’apparition, ou la réapparition (après un premier développement à la suite de la Première Guerre Mondiale, le football féminin est finalement interdit, en France, au début des années 1930) du football féminin en 1968 est intimement liée aux transformations affectant la vie sociale et culturelle des Français et en particulier les profonds changements inhérents à la nouvelle place de la Femme dans la société. En trois ans, de 1968 à 1971, le football féminin compte plus de 2 000 joueuses officiellement licenciées à la Fédération. Le début des années 1970 marque la reconnaissance du football féminin par la Fédération Française de Football, par la mise en place d’une organisation spécifique pour cette pratique :  une commission centrale, des commissions régionales et un Statut Fédéral Féminin.

Dans le même temps, les premières « femmes en noir » apparaissent progressivement. Hélène Mleczak se voit délivrer en 1966, par la Ligue du Nord-Est, la première carte d’arbitre officielle à une personne de sexe féminin. De la même manière, Martine Giron, de la Ligue de Paris, reçoit son écusson d’arbitre de Ligue en 1967. La Ligue de Paris, comme l’ensemble des régions, donne en effet la possibilité aux femmes d’arbitrer, mais seulement pour les matchs de jeunes. L’épouse de l’arbitre fédéral Henri Didier, Pauline Didier, se lance dans ce contexte dans l’arbitrage en 1974 (Image 1). Officiant en tant qu’arbitre de la Ligue de Paris, elle est désignée, comme le veut la règle, uniquement sur les rencontres de jeunes, que ce soient des cadets, des minimes ou des juniors. Si une petite vingtaine d’arbitres féminines est comptabilisée dans les rangs de la FFF au début des années 1970, ces dernières sont désormais 110 en 1980, soit moins de 0,5% du total des 18 580 arbitres français. En 1974, seules deux d’entre elles arbitrent des rencontres seniors masculines, bénéficiant de dérogations de la part de leurs Ligues respectives. La politique menée par la FFF et la CCA reste bien d’autoriser les femmes-arbitres, tout en limitant cette pratique à l’arbitrage des rencontres de jeunes. Finalement, l’arbitrage du football, autrefois réservé exclusivement aux hommes, s’ouvre désormais, bien que lentement, aux femmes.

Alexandre Joly est un historien du sport. Il a soutenu une thèse en 2021 portant sur l’histoire des arbitres dans le football professionnel français durant le XXe siècle.

                   PAULINE DIDIER